Quatrième volet de « Bitcoin le mal-aimé », une série qui réfute les mythes populaires autour du Bitcoin.
« Bien que des gens s'intéressent au Bitcoin dans le monde entier, il finira tôt ou tard par se faire bannir par l'État »
Qui ne l'a jamais entendu dire ? Il est vrai qu’on peut penser que Bitcoin n’est qu’un jeune système de 12 ans d'âge qui ne pourrait résister à l’attaque d’un gouvernement, voire même de plusieurs gouvernements agissant à l'unisson.
Et pourtant, c’est loin d’être aussi simple que cela. En effet, Bitcoin ne peut être censuré voire arrêté. Pourquoi ? Bitcoin est distribué. Il n’y a pas de tête à couper. Il n’y a pas de bureaux ou de responsables en charge du projet. Aucune autorité capable de répondre à quelconque requête. Au-delà de ce simple fait, Bitcoin est omniprésent dans le monde entier. C’est un réseau qui fonctionne 24 heures sur 24, 7 jours sur 7 et, vous l’aurez deviné, 365 jours par an. Sur tous les fuseaux horaires à la fois. Sans aucune permission, licence ou agrément. Le réseau de Bitcoin n’a aucune conscience des frontières, de la législation en vigueur ou du système monétaire en place. Bitcoin est un réseau informatique distribué qui ne peut se faire débrancher ou éteindre.
Plusieurs gouvernements autoritaires, comme en Iran ou en Chine, ont déjà essayé de bannir Bitcoin a plusieurs reprises par le passé, mais ne sont jamais parvenus à stopper son utilisation. Les entreprises, aux périphéries du réseau, peuvent néanmoins être limitées voire stoppées dans leurs activités. C’est le cas de sociétés de minage en Chine, qui ont dû déplacer leurs opérations hors du pays lorsque le régime Xi Jinping à rendu les opérations de minage de bitcoin illégales l’été 2021. Des sociétés offrant des services d’échange ou de courtage sont aussi sujettes à des législations très strictes dans certaines juridictions. Certaines ont aussi dû fermer boutique à la suite d'annonces gouvernementales. Mais qu’en est-il du réseau Bitcoin ?
Bitcoin est d’une résistance étonnante. C’est un système robuste divisé en plusieurs niveaux d’utilisateurs qui participent au bon fonctionnement du réseau.
Les opérateurs de nœuds(« full nodes » en anglais) sont chargés de vérifier régulièrement la validité des transactions qui sont diffusées sur le réseau par les mineurs, en moyenne toutes les 10 minutes. Cette activité est très accessible, peu compliquée, et surtout peu coûteuse. Chaque utilisateur possédant des bitcoins est encouragé à avoir un nœud pour vérifier que les bitcoins qu’il détient lui appartiennent bien. L'intérêt est aussi de vérifier que la somme totale de bitcoins en circulation ne dépasse pas la limite maximale inscrite dans le protocole, qui est connue de tous: 21 millions. De manière autonome, un utilisateur peut vérifier qu’il possède bien 1 bitcoin sur 21 millions, sans surprise d’inflation future.
Les mineurs s’occupent de sécuriser le réseau avec le traitement des transactions en attente d’être ajoutées puis confirmées dans le réseau. Cette activité, appelée le minage, est très coûteuse et peu accessible mais permet une rémunération très profitable pour les meilleurs d’entre eux qui parviennent à créer un bloc de transactions avant tout le monde. Les mineurs ne peuvent pas tricher et ajouter des transactions invalides car elles se verraient refusées par les opérateurs de nœuds qui ont tout intérêt à vérifier que chaque transaction respecte les règles du protocole. Si triche il y a, le mineur en question verra son bloc rejeté et tout son travail perdu, ce qui représente des centaines de milliers d’euros de dépense électrique.
Les développeurs qui contribuent à améliorer le code informatique de Bitcoin ne peuvent pas non plus imposer leurs règles arbitraires étant donné que le logiciel de Bitcoin doit être mis à jour par chacun des opérateurs de nœuds et des mineurs, de manière complètement volontaire. Si un bug ou une fonctionnalité douteuse était introduit par un développeur malhonnête, il serait immédiatement décelé et exclu du réseau. Un nœud avec une version de logiciel qui ne respecte pas les règles actuelles du protocole n’est plus synchronisé avec le reste du réseau. Nous couvrirons ce sujet qui fait référence à des embranchements (« forks » en anglais) dans un futur article.
Un État qui souhaite prendre le contrôle du réseau Bitcoin pour le stopper est donc bien dans l'embarras. Bloquer l’accès à l’internet est souvent une possibilité discutée, mais elle est limitée dans son approche. En effet, il faudrait bloquer internet dans sa globalité, ce qui inclut des dizaines de milliers de fournisseurs d’accès à internet répartis dans le monde entier. Même si cela était une option théoriquement possible, le réseau Bitcoin utilise d’autres méthodes pour propager des transactions, comme des réseaux satellites, les ondes radios ou encore les réseaux maillés locaux.
Étant un système informatique à code source ouvert (« open source » en anglais), le code de Bitcoin est disponible dans tous les recoins de la planète en plusieurs dizaines de milliers d’exemplaires. Une telle redondance rend Bitcoin absolument résistant à toute censure étant donné sa nature numérique. Bitcoin est simplement du code informatique, qui lui-même est du texte, qui peut être lu, copié, mémorisé et partagé sans limite. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, Bitcoin est composé de technologies testées au fil des années, il n’a aucune nouvelle technologie révolutionnaire utilisée dans son protocole. L’innovation est dans l'assemblage de ces composants entre eux.
Un État décidé à bannir Bitcoin est voué à l’échec étant donné la mobilité des participants du réseau, et la vaste répartition de ses utilisateurs aux quatre coins du globe. L’attaquer pour essayer de le détruire ? Très coûteux et peu efficace. Un État qui souhaiterait simplement détruire Bitcoin se ruinerait pour essayer d'empêcher des transactions d’être traitées en créant uniquement des blocs sans aucune transaction. Cela ne serait d’ailleurs qu’une nuisance temporaire et très peu durable. Il pourrait aussi interdire à des mineurs de traiter certaines transactions, mais elles seraient simplement ajoutées par d’autres mineurs dans d’autres pays. Se coordonner avec d’autres gouvernements est possible, mais l'intérêt économique d’ajouter des transactions de manière non-discriminatoire alors qu’elles sont valides dépasse la simple volonté politique d’autres mineurs.
En résumé, bannir ou interdire Bitcoin ne peut que nuire à l’État en question. Il vaudrait mieux favoriser l’industrie locale avec des cadres réglementaires souples pour développer de nouvelles entreprises porteuses d’innovation et de création de nouveaux emplois qualifiés. Des gouvernements trop contraignants, voire hostiles envers Bitcoin vont motiver l’industrie à changer de juridiction, et perdre de potentielles taxes. Pourquoi ne pas utiliser le réseau électrique, souvent nationalisé, pour miner du Bitcoin et en acquérir dans une optique de réserve de valeur ? Certains pays ont déjà fait part de leur intérêt à mettre cela en place, c’est le cas du Salvador. Arrivera le point culminant de l'adoption du Bitcoin, qu'il sera évident que le bannir sera futile, et qu'il vaudra mieux s'en procurer, juste au cas où...